Avec l’arrivée de la fin du mois d’octobre, nous voyons les vitrines se colorer de noir et d’orange, et se parer de chauves-souris, de squelettes, de toiles d’araignées et autres décorations morbides. Dans le même temps, surgissent des campagnes d’opposition à la fête d’Halloween : contre le caractère commercial, contre le caractère païen, contre... Est-ce que ça vaut le coût ?
Pour ma part, je le redis, je ne le pense pas. Il y a dans cette séquence de fêtes Halloween, Toussaints, Commémoraison de tous les défunts, quelque chose de suggestif. En effet, la fête d’Halloween met en évidence ce qu’il peut y avoir de terrifiant, d’angoissant, d’horrible dans la mort. Peut-on être contre l’évidence ? Qui n’a pas fait l’expérience de cela ? Qui n’a pas éprouvé terreur, angoisse, souffrance et peine devant la mort ? Il serait illusoire de le nier. La fête d’Halloween prend le parti d’en rire, pour se distraire de ce caractère angoissant. Mais cela suffit-il ?
Au-delà de cette perspective angoissante et terrifiante, la fête de Toussaint affermit notre espérance, nous permet de voir plus loin, au-delà de nos angoisses. Pour Toussaint, nous célébrons la fête de tous ceux qui sont saints, connus et inconnus, c’est-à-dire de tous ces hommes et femmes qui ont partagé notre vie humaine, qui ont cheminé à nos côtés, dans nos familles, dans nos villages, et qui aujourd’hui et pour l’éternité, sont entrés dans l’amour de Dieu. Ce ne sont pas des morts que nous célébrons, mais des vivants, passés de cette vie terrestre à la vie éternelle. Si nos yeux ne les voient plus en cette vie terrestre, notre cœur est toujours capable de reconnaître , discerner et entrevoir leur présence auprès de nous. La fête de Toussaint est comme une lumière dans un tunnel obscur, qui nous permet de ne pas perdre confiance, qui affermit notre marche, qui nous ouvre une perspective et une espérance.
C’est cette espérance qui nous fait comprendre l’importance de la prière pour tous les fidèles défunts. Tous ces hommes et ces femmes qui ont tenu une place dans nos vies, parce qu’ils avaient une place dans notre cœur. Certes, ils ont quitté cette vie, mais gardent toujours une place dans notre cœur. Aussi, prier pour eux, c’est continuer à leur laisser cette place dans notre cœur, et dans notre vie. Prier pour eux, c’est continuer à leur exprimer notre affection, notre reconnaissance. Prier pour eux, c’est continuer à les accompagner, à être auprès d’eux, à leur permettre, à leur tour, d’entrer dans l’éternité de l’Amour de Dieu. Les fleurs que nous déposons dans les cimetières, le marbre gravé, nos visites aux cimetières sont les signes de ce qu’au-delà de la mort, persiste notre amour et notre attachement. La mort ne détruit pas tout. La mort n’a pas le dernier mot.
Au lieu de nous battre « contre » Halloween, il serait préférable de nous encourager à entrer dans toute la logique pleine d’espérance de cette séquence de fêtes. Notre erreur serait de nous arrêter, de nous figer seulement sur l’une ou sur l’autre, et d’oublier les autres. Il serait dommage de ne fêter qu’Halloween, en laissant de côté l’espérance de Toussaint, et en oubliant de prier pour nos frères et sœurs défunts, surtout pour des chrétiens.
Abbé Bruno Gerthoux, curé de Robion et des Taillades