Jésus passant devant la table de travail de Levy, lui dit « Viens ! Suis-moi ! », et l’Evangile de poursuivre : « l’homme se leva et le suivit ». La simplicité cette mention ne laisse pas de me surprendre, d’autant qu’elle contraste avec l’attitude des pharisiens. Bons croyants, ils connaissent bien la Parole de Dieu et sont des maîtres de la Loi. Forts de leur savoir et de leurs connaissances, ils s’étonnent de voir Jésus à table avec des publicains – comme Levy – et des pécheurs. La réponse de Notre Seigneur est presque cinglante « Ce ne sont pas les gens bien portants qui ont besoin du médecin, mais les malades et les pêcheurs ».
Quelle est la différence entre les uns et les autres ? Qu’est-ce qui conduit Levy à répondre avec autant de simplicité et de spontanéité à l’appel du Seigneur ? Pourquoi ces publicains et ces pécheurs prennent-ils leur repas à la table du Seigneur Jésus ? Précisément, parce que les uns ont conscience d’être malades et d’avoir besoin du médecin, et pas les autres. Or, les pharisiens, qui connaissent la loi, savent bien ce qu’est le péché.
En fait, les pharisiens n’en sont qu’au premier stade et ne connaissent que la première nuance du péché. Ils reconnaissent qu’ils sont pécheurs, d’une manière générale, abstraite, comme nous pourrions reconnaître, chacun, qu’à cause de la fragilité de notre condition humaine, nous pouvons tomber malades. Pour autant, cela ne fait pas de nous des personnes malades, et ne permet pas nécessairement de voir son péché, sa maladie.
Une deuxième étape est nécessaire : il faut reconnaître que nous avons péché, reconnaître nos péchés, reconnaître que ce n’est pas simplement une possibilité, mais une réalité. La nouvelle traduction de la Messe met cela en évidence, remplaçant « le péché », en général comme une réalité abstraite, par « les péchés », nous ouvrant à la reconnaissance, chacun, de nos péchés, plus conforme en cela, au texte original en latin. C’est un peu comme si, sachant que nous pouvions tomber malades, attentifs aux symptômes qui se manifestent, nous reconnaissions qu’en fait, nous sommes malades.
Une troisième étape est nécessaire, reconnaître nos péchés, concrètement, en particulier, spécifiquement comme une réponse au paroles de Notre Seigneur : « allez apprendre ce que signifie ’je veux la miséricorde et non les sacrifices’ ». Dans la reconnaissance concrète et particulière des péchés que nous avons commis, nous nous plaçons aussi dans la situation de recevoir la miséricorde, comme un malade qui vient voir le médecin, lui présente son mal, et par suite, lui permet de le soigner.
Ainsi, en acte et en vérité, concrètement et réellement, Levy, et chacun de nous, peut se lever, ne pas rester dans son péché, et suivre le Seigneur en recevant de lui la miséricorde.
Abbé Bruno Gerthoux, curé de Robion et des Taillades