Dans sa lettre pastorale au moment de l’épidémie de choléra à Avignon en 1884, l’archevêque écrit : « Vous avez applaudi aux mesures de prudence recommandées par la science et par l’autorité civile ; mais vous avez compris que pour assurer à ces moyens naturels toute l’efficacité désirable, il fallait recourir à Celui qui est l’arbitre suprême de la vie et de la mort. Pour rendre vos supplications plus puissantes, vous les avez confiées à la Très Saint Vierge notre refuge assuré dans toutes les peines et toutes nos alarmes ». L’archevêque salue les mesures de précaution et de bon sens, évidemment, et il eût été inconscient de s’en dispenser, mais il souligne aussi combien la prière a sa place et son importance, surtout pour des chrétiens, afin de contribuer à donner à ses mesures une meilleure et plus grande efficacité.
Notre pays provençal fut touché, entre autres, par les épidémies de peste au XVIIe siècle et de choléra au XIXe. Nous n’avons pas manqué d’invoquer saint Sébastien, saint Roch et la Vierge Marie pour être préservés de ces maux. La chapelle saint Roch, à Robion, édifiée en 1633 après une épidémie de peste qui avait touché douloureusement le pays mais avait épargné Robion, malgré quelques cas isolés, comme celui du père de l’abbé Alexandre Martin. Elle est la marque de la reconnaissance fidèle et fervente des chrétiens dont la prière avait été exaucée.
Mais nous savons combien ces épidémies peuvent causer de légitimes inquiétudes, mais parfois, elles laissent la place à la panique. Jean Giono, dans son roman Le hussard sur le toit - dans le contexte de l’épidémie de choléra de 1835- fait dire à l’un de ses personnages : « c’est comique... nous avons un épidémie de peur ». Assurément, c’est sans doute la première conséquence de ces épidémies, quelles qu’elles soient. Giono décrit aussi combien dans ces moments, la peur produit la suspicion, l’égoïsme et l’individualisme. Et bien souvent, au lieu de protéger et prévenir, la panique et la peur ne font que hâter le mal et ses conséquences. Quelqu’un me disait qu’il avait vu un supermarché quasiment dévalisé de pâtes !
Aussi, même si j’ai entendu à la radio l’un ou l’autre journaliste ridiculiser la légitime réaction de nombreuses communautés chrétiennes, je pense que la prière aussi a sa place parmi les mesures nécessaires en temps de menace épidémique, surtout pour des chrétiens, ne serait-ce que pour se protéger soi-même contre toute inquiétude démesurée et toute peur, pour conserver et nourrir une solidarité et une charité fraternelle, et unir nos forces et nos cœurs dans une même prière plus fervente.
En ce mois de mars, je renouvelle mon invitation et mon exhortation à nous tourner vers saint Joseph, par la prière quotidienne des litanies, et une messe (jeudi) pour demander d’être préservés de l’épidémie.
Abbé Bruno Gerthoux,
curé de Robion et des Taillades