Saint François de Sales, dans L’introduction à la vie dévote, au chapitre XXXI de la 3° partie, écrit : « Il est force de relâcher quelquefois notre esprit et notre corps encore à quelque sorte de récréation ». C’est une force authentique, c’est-à-dire une vertu que de savoir le faire au moment opportun.
Afin d’appuyer son propos, il donne l’exemple d’une conversation entre saint Jean l’Evangéliste et un chasseur rapportée par saint Jean Cassien, fondateur du monastère de Saint-Victor à Marseille. L’Evangéliste aurait demandé au chasseur qui s’étonnait de le voir prendre du temps de détente dans la forêt, pourquoi il ne gardait pas son arc tendu en permanence. Le chasseur ayant répondu que c’était par peur qu’il ne perde de sa force, saint Jean lui aurait dit qu’il en était de même pour lui, et que ce moment de détente n’avait d’autre but que d’être d’autant plus vif à la contemplation par la suite, et ainsi de conserver toute sa force pour les choses qui ont plus de valeur.
Saint François commente : « prendre l’air, se promener, s’entretenir de devis joyeux et amiables, sonner du luth ou autre instrument, chanter en musique, aller à la chasse, ce sont récréations si honnêtes que pour en bien user il n’est que de la commune prudence, qui donne à toutes choses le rang, le temps, le lieu et la mesure ». Ce faisant, il nous donne de belles indications pour comprendre et reconnaître la vertu de prudence. Et de continuer : « il se faut seulement garder de l’excès, soit au temps que l’on y emploie, soit au prix que l’on y met ; car si l’on y emploie trop de temps, ce n’est plus récréation, c’est occupation ; on allège pas l’esprit ni le corps, au contraire, on l’étourdit et on l’accable ».
Ces mois d’été, même s’ils ne sont pas synonymes de vacances pour tout le monde, et ce d’autant plus cette année après ces périodes éprouvantes de confinement, de déconfinement et de menace épidémique qui nous ont gardé et nous gardent encore sous une certaine tension, doivent être propices à ces activités « récréatives », c’est-à-dire, littéralement, capables de nous re-créer, de nous rendre nos forces, de remettre les choses à leur place, et finalement, de reprendre nous-mêmes notre place dans notre propre vie. Mais comment le faire, sans laisser à Dieu sa place dans notre vie ?
Abbé Bruno Gerthoux, curé de Robion et des Taillades