Au-dessus du tambour d’entrée de l’église de Robion, il y a un grand tableau qui illustre un double thème de la piété de la période moderne : d’une part, la remise du rosaire à saint Dominique et à sainte Catherine de Sienne par la Vierge-Marie, et d’autre-part, au bas du tableau, la délivrance des âmes du Purgatoire.
C’est un fait que le mot de purgatoire est apparu relativement tard dans le vocabulaire théologique, sans doute au XII°s. Que le mot apparaisse tardivement ne signifie pas que la réalité elle-même n’existait pas auparavant, au contraire. Ce mot a été forgé pour faciliter la désignation de cette réalité, la définir et l’expliquer.
Dans la Sainte-Ecriture, au livre de l’Apocalypse, saint Jean écrit : « heureux les morts qui meruent dans le Seigneur. Oui dit l’Esprit, dès à présent qu’ils se reposent de leurs travaux, car leurs péchés (ou leurs œuvres) les suivent » (Ap. 14, 11). Et encore, dans l’Ancien-Testament, au chapitre 12 du livre des Maccabées, il est fait mention d’une collecte pour offrir des sacrifices pour les péchés des morts, précisant que c’est une « belle et noble action inspirée par la pensée de la résurrection, car s’ils n’avaient pas espéré que les soldats tombés dussent ressusciter, il était superflu et ridicule de prier pour les morts » (14, 44).
Après notre mort, au jugement particulier, il n’y a pas cinquante solutions : soit nous sommes sauvés et nous sommes avec Dieu, soit nous sommes damnés et nous sommes séparés de Dieu. De cela, on pourrait penser que seuls ceux qui sont parfaits et sans péchés peuvent être sauvés. Or, cette notion de purgatoire met en évidence qu’il y a une espérance même pour ceux qui meurent avec le poids de leurs péchés qui les suit. Certes, ils sont alors sauvés, mais ce poids de leurs péchés, les tient encore éloignés de Dieu, sans en être complètement séparés. Ils est nécessaire qu’ils soient purifiés de ces péchés et de leurs conséquences. Cette purification, qui est plus un état qu’un lieu géographiquement défini, c’est précisément cela le purgatoire.
Qu’est-ce qui peut nous libérer du poids du péché ? Comme je le rappelais dans l’éditorial de la semaine dernière : « la charité, l’amour, couvre une multitude de péchés ». C’est bien l’amour, en acte et en vérité, qui peut purifier du péché et du mal dont il est la conséquence. Comme le dit justement la prière de saint François : « Là où est la haine, que je mette l’amour. Là où est l’offense, que je mette le pardon. Là où est la discorde, que je mette l’union. Là où est l’erreur, que je mette la vérité. Là où est le doute, que je mette la foi. Là où est le désespoir, que je mette l’espérance. Là où sont les ténèbres, que je mette la lumière. Là où est la tristesse, que je mette la joie. »
Même au-delà de la mort, nos actes et nos paroles d’amour, y compris par la prière, peuvent purifier du mal engendré par le péché. C’est cette espérance en la puissance de l’amour qui est affirmée par cette notion de purgatoire
abbé Bruno Gerthoux, curé de Robion et des Taillades